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Rencontre avec Frédéric, Mourad, Ilyun de chez Médiacycles


La mobilité douce pour se remettre en selle

 

Très en prise avec leur territoire et à l’écoute des aspirations sociétales, les structures d’insertion s’attachent à intégrer le respect de l’environnement au sens large dans leurs activités. La mobilité douce en est une des illustrations. A Mulhouse, Médiacycles en est l’un des acteurs phare.

Petite association deviendra grande. En 2002, à une époque où le vélo n’a pas encore le vent en poupe, Médiacycles propose de la location et du gardiennage de vélos en gare SNCF de Mulhouse afin de permettre l’intermodalité. Vingt-deux ans plus tard, l’association s’est amplement développée et anime aujourd’hui la Cité du Vélo créée avec Mulhouse Alsace Agglomération, la ville de Mulhouse et d’autres associations. Sorte de guichet unique du vélo et de la mobilité douce qui propose de la location et du gardiennage de vélo, des ateliers de réparation participatifs ou encore du conseil en mobilité. Le projet, co-financé par le FAPE EDF, permet à Médiacycles de développer ses activités liées au vélo et d’en ajouter une nouvelle : le diagnostic et conseil en mobilité.

Depuis sa création en 2002, avec vingt-cinq vélos en location, Médiacycles a étoffé sa palette d’activités. D’abord, elle se lance dans la médiation dans les transports en commun pour le compte de la SNCF, puis dans l’accompagnement de jeunes adultes porteurs de handicap mental afin de développer leur autonomie dans leurs déplacements. « C’est une activité forte socialement et porteuse d’enjeux. Nos salariés en insertion sont fiers d’y participer », souligne Aziza Imloul, Directrice de Médiacycles.

 

La mobilité douce pour tous

En 2011, la structure compte environ 200 vélos et l’activité cycles représente 10 % de l’ensemble. « Si on vient vers nous aujourd’hui sur la partie mobilité, c’est justement parce qu’on est une structure d’insertion. D’autant que la mobilité douce sert aussi les enjeux territoriaux en matière d’emploi », précise Aziza Imloul. C’est ainsi qu’en 2018 s’opère un changement d’échelle. « A cette époque, nous avons eu la chance de remporter un nouveau marché auprès de Mulhouse Alsace Agglomération [M2A] pour gérer une flotte de près de 800 vélos. Notre notoriété s’en est retrouvée accrue. L’activité cycles est devenue prédominante ».

En 2024, Médiacyles fusionne avec Mobilité pour l’emploi, une auto-école solidaire. Ce qui lui permet de candidater et remporter l’Appel à Manifestation d’intérêt émis par M2A autour d’un projet de plateforme d’éco-mobilité inclusive : la Cité du vélo. Médiacycles y propose une offre étendue de location de vélos, une vélo école inclusive et une activité de conseil et diagnostic mobilité. « Cet AMI, c’est la reconnaissance de la qualité du travail de nos salariés en insertion par des acteurs comme la M2A, la SNCF, les collectivités et les entreprises privées. C’est la démonstration que les publics éloignés de l’emploi ont des capacités. Ça permet de faire changer les regards ».

 

Lever les freins à l’emploi

Frédéric (à droite sur la photo) est encadrant technique chez Médiacycles. Il a été embauché dans le cadre du projet de Cité du vélo. Il nous confie que travailler dans le secteur de l’insertion fait sens pour lui. « On sert une noble cause. On se sent utile ». Son rôle est de guider les salariés en insertion à la fois sur le savoir-être (respecter les horaires, etc.) et sur le volet métier en leur apprenant à réparer les vélos de la flotte de Médiacycles. « J’essaie de les valoriser pour leur redonner confiance en eux. Ils ont vécu des choses difficiles. Quand on est sans emploi, on perd confiance. Je le sais d’autant mieux que je l’ai vécu moi-même ». 

Aujourd’hui, c’est auprès de Mourad (à gauche sur la photo) qu’il dispense son savoir. Frédéric nous explique que « Mourad est un très bon mécanicien, très impliqué. Auparavant il était mécanicien voiture, comme moi. Ça crée un bon feeling entre nous ». Subir la précarité laisse des traces et il n’est pas simple de parler de soi, de son parcours de vie lorsque mille soucis nous accablent. Taiseux, Mourad nous glissera néanmoins qu’avant il travaillait dans un garage auto. « Je suis arrivé chez Médiacycles de fil en aiguille, après la rupture de mon contrat là-bas. Cette opportunité ici c’est unique, surtout avec le personnel qui est très bien ». Plus à l’aise avec la technique, Mourad s’affaire à réparer un pédalier récalcitrant. Parfois les mots sont insuffisants à exprimer certaines fractures de l’estime de soi. A voir Mourad concentré sur la réparation du vélo, on comprend que ce faisant c’est aussi lui qu’il répare peu à peu. On repense alors à ce qu’Aziza Imloul nous a expliqué précédemment : 

Lorsqu’ils arrivent chez Médiacycles, certains salariés en insertion rasent les murs et sont mutiques. Puis, on les voit se déployer au fil du temps. A l’issue de leurs 24 mois de contrat chez nous, ils sont transformés et savent vendre leurs compétences. Ils ont repris confiance en eux et retrouvé leur dignité. 

Ilyun a 20 ans. Sa mission : répondre aux appels téléphoniques, gérer les locations de vélos et la maintenance. « Ça me plaît beaucoup, l’ambiance est agréable. Je me sens bien ici. Le marché du travail à Mulhouse n’est pas très riche. Ce n’est pas facile de trouver un emploi, surtout quand comme moi on n’a pas de formation. Ce que j’aimerais faire c’est être vendeur en magasin. Je me sens à l’aise dans la relation client. Je préfère ça plutôt que de travailler derrière un écran. Mon travail ici me permet d’avoir un revenu tout en cherchant un emploi en parallèle et en me formant ». Ilyun n’en revient pas :

Ce sont les salariés et retraités qui donnent pour l’insertion ?! Franchement, je leur dis merci. Grâce à eux j’ai trouvé un emploi. Je leur en suis très reconnaissant. Trouver un travail quand on est jeune, c’est très compliqué quand on n’a pas du tout de diplôme ni d’expérience. J’espère que dans cinq ou dix ans vous me reverrez avec un meilleur travail. Ce serait un honneur.