« Aujourd’hui, on valorise mon travail, cela ne m’était jamais arrivé avant »
Lyon, 22 janvier 2024. Mika, salarié en insertion au sein de la Fondation de l’Armée du Salut vient de recevoir les clés de son nouveau logement… Une remorque frigorifique transformée en habitation le temps de trouver une solution d’hébergement plus stable. Le projet, co-financé par le FAPE EDF lui permettra aussi d’exercer un emploi d’insertion. Témoignage.
« Il faut bien nous donner notre chance pour que l’on travaille ! », insiste Mika, 43 ans tout juste. Pour lui, c’est aujourd’hui le grand jour : il va signer un contrat avec la Fondation de l’Armée du Salut, le sésame qui lui permettra d’avoir enfin une solution d’hébergement.
Remonter la pente
« Comme j’étais à la rue depuis l’âge de 17 ans, c’était très compliqué pour moi de trouver un emploi. Aujourd’hui, c’est le déclic, et tout s’enclenche… » Mika a la parole vive et l’accent du Sud-Ouest. Cela ne fait qu’une dizaine d’années qu’il est en effet arrivé à Lyon. « J’ai grandi dans le Médoc, où j’ai enchaîné plusieurs petits boulots. » Il a œuvré dans les vignes dès 12 ans, fait des ménages, tondu les haies chez les particuliers, gardé des enfants, réalisé des animations dans un centre culturel. « J’ai essayé de faire tout ce que je pouvais pour vivre, résume-t-il. Mais sans logement pas d’emploi stable, sans emploi, pas de logement. C’est un serpent qui se mord la queue. Vous savez, personne ne veut offrir sa chance à un SDF, les patrons n’ont pas confiance… »
Mika a galéré longtemps avant de tomber sur une assistante sociale qui lui parle du nouveau dispositif qui lui a permis de se remettre en selle.
« Premières Heures en Chantier »
… c’est le nom du dispositif porté l’association Convergence France. « Il a été mis en place à titre expérimental il y a une dizaine d’année à Paris, puis étendu à toute la France. Il fallait en effet trouver une solution d’insertion accessible aux personnes sans-abris », explique David de San Nicolas Saba, éducateur et encadrant technique qui accompagne aujourd’hui Mika dans son parcours d’insertion. « C’est compliqué en effet pour des personnes à la rue de travailler d’emblée 30 heures par semaine. Ce dispositif propose donc d’aller par pallier, en commençant par travailler une matinée au début, puis deux, et ainsi de suite. L’objectif étant d’accéder à un parcours d’insertion classique qui permettra de se former et de déboucher sur un emploi stable. »
Mika a signé son contrat en août dernier. « Aujourd’hui, je suis agent de démantèlement, je démantèle le bois, la ferraille, et je fabrique des objets avec, des meubles d’intérieur ou de jardin, ou encore des étagères ou des crèches de Noël. Ce qui est bien c’est que l’on a carte blanche et que l’on travaille à plusieurs. J’ai commencé par 4 heures par semaine et, maintenant, je suis passé à 20 heures. Dans mon travail, aucune idée n’est mauvaise… une idée, c’est une idée ! » En décembre, Mika a ainsi montré au public son savoir-faire dans le cadre d’une boutique éphémère. Une petite victoire.
Remorquage
Une autre victoire encore. Dans le cadre de ce programme, la Fondation de l’Armée du Salut, propose aux salariés en insertion une solution d’hébergement innovante avec le projet « Remorquage ». « Nous avons bénéficié d’un don de 14 semi-remorques frigorifiques que nous avons transformé en logement », raconte Gaëlle Fructus, chargée de mission recherche de fonds participation et bénévolat à l’Armée du Salut. « C’est un projet vertueux, puisque ces remorques mises au rebus peuvent être réaménagées pour des familles comme pour des personnes isolées. » Mika en a les clés depuis ce matin. Il est tout heureux, mais attend de signer pour entrer dans son nouveau logement. Surtout, il vient de visiter un chantier d’insertion sur lequel il pourrait, plus tard, travailler et qui lui plaît bien : « Dans ce chantier, on fait de la menuiserie, c’était mon premier métier. Vous voyez, tout se met en place petit à petit. »
Lorsqu’on lui parle des dons des salariés et retraités d’EDF pour soutenir les structures d’insertion, Mika est reconnaissant. « Heureusement que des gens comme ça existent, dit-il, sinon ces structures n’existeraient pas et des gens comme moi n’auraient pas de travail. Bon, je ne vais pas passer par quatre chemins : travailler, discuter avec les autres, être reconnu pour et par mon travail, c’est ce qui me permet d’exister et tenir aujourd’hui. » Mika a trouvé la clé.
